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Atelier Faber et Mazlish (1/7)

Atelier « Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent » des Faber et Mazlish.

Attention, limité à 8 participants ! Réservez vite !

Que vous soyez parent, futur parent, grand-parent ou professionnel.le de l’enfance, on vous propose une série de 7 ateliers de communication intergénérationelle.

Tous les jeudis, du 5 novembre au 17 décembre.

Ces ateliers vous donneront les bases de la parentalité bienveillante ainsi que des outils concrets pour faire face aux différentes situations que l’on rencontre au quotidien avec les enfants.

Nous parlerons des émotions ainsi que des besoins des enfants. Nous apprendrons à les guider vers l’autonomie, sans cris, sans punitions, sans violence.

En participant à cet atelier vous apprendrez à:

– Accueillir les émotions difficiles des enfants

– Exprimer vos propres émotions, besoins et désaccords sans blesser

– Susciter le désir de coopérer chez l’enfant

– Utiliser des alternatives à la punition

– Résoudre les conflits familiaux dans une ambiance de calme et de coopération

… pour le plus grand bonheur de tous !

Le libre grandir et la responsabilité parentale

Par Vicky

 

Bon, finalement en parentalité bienveillante on pose un cadre et des limites ou pas ? Et est-ce qu’on fait des choix à la place de nos enfants?

Ces deux questions reviennent sans cesse et divisent à volonté. D’un côté les bienveillantes* anti-âgisme qui disent le plus souvent non, de l’autre les bienveillantes-mais-pas-laxistes qui disent oui !

 

Le cadre ou la structure

 

Je vais rapidement dégager la question du cadre en répondant que, à mon sens, la phrase « les enfants ont besoin d’un cadre, ça les rassure » est archi-fausse. Peut-être que certains enfants se sentent rassurés avec un cadre mais c’est loin d’être une vérité absolue et un précepte éducatif. Ce que je veux dire c’est que certains adultes aussi se sentent rassurés dans un cadre donné, peut-être que ça leur permet de mieux travailler, d’être plus calmes, plus efficaces etc. Et d’autres adultes ont juste une sainte horreur des cadres, des cases et des restrictions, ils étouffent dedans. Est-ce que parce que certains adultes se sentent plus à l’aise professionnellement en étant salariés plutôt que sur un autre statut, on devrait conclure qu’ « un adulte a besoin d’un CDI, ça le rassure » ? Avec les enfants et le fameux cadre c’est la même chose. Pour certains enfants c’est sécurisant, pour d’autres non. Je tiens quand même à dire que cette phrase, tellement clichée en français, n’existe pas dans ma langue maternelle. Nous n’avons pas de cadre pour les enfants, que pour les tableaux.

 

En revanche un enfant a besoin de structure. Et en plus elle doit être solide. Plus la structure sera solide, plus il pourra se réaliser et se construire. Dans toutes les directions et sans limitation. Parce que la structure permet, tandis que le cadre limite. Et concrètement, quelle est la différence ? Parce que si c’est pour jouer sur les mots…

 

En fait je ne sais pas. J’invite les parents qui pensent qu’un cadre est nécessaire au bon fonctionnement de leur famille ou de leur enfant à m’expliquer ce qu’ils entendent par cadre avec des exemples concrets. Parce que moi je ne vois pas ce qu’il y a à imposer de plus que ce qui s’impose de facto, du fait de naître et de vivre dans une famille, qui elle-même évolue dans une société donnée avec ses codes, ses règles et ses lois. L’enfant qui vient au monde a déjà tout un cadre autour, il ne peut pas l’ignorer, il est obligé de se conformer, c’est le contrat social.

 

La structure c’est l’assurance du « je suis là pour toi quoi qu’il arrive », c’est la confiance que l’enfant peut ressentir vis-à-vis du parent, c’est le « je crois en toi » mais c’est aussi le « moi, parent, je sais qui je suis ». Et c’est parce que cette dernière partie est si difficile que le cadre peut devenir rassurant. Pour l’enfant, comme pour le parent, je dirais même surtout pour ce dernier. D’une manière générale j’ai remarqué que moins on a confiance en un système, plus on le balise. (Ça a l’air évident je sais, mais ça devient inconfortable et problématique quand on prône le système en question.) En clair, plus un parent sait qui il est et où est-ce qu’il va, moins il aura besoin de cadres, des « il faut » et des « par principe ».

 

Les limites

 

Le problème des limites n’est pas très différent en vrai, un cadre n’étant rien d’autre que la somme des limites. Et des limites on en a tous (de la même manière qu’on a un cadre « naturel » donc), on a les limites de notre corps, de notre nature humaine, des lois physiques etc. Nous avons également les limites imposées par la loi, ainsi que les limites de ceux qui nous entourent. Pour survivre en société nous devons les respecter.

 

Je suis bien évidemment contre l’idée d’imposer des limites « parce qu’il faut bien » ou « parce qu’on n’est pas laxistes » ou… bref, par principe. Et je suis partisane de la liberté d’exploration de ses propres limites. Une personne a besoin de savoir ce qu’elle est capable de faire ou encore comment le monde réagit à sa façon de s’y positionner. Personne ne peut vous apprendre ça, en revanche on peut être empêché.e de l’apprendre, si l’on n’a pas justement cette liberté d’exploration de ses propres limites.

 

Lorsqu’on est enfant, pendant cette exploration on a besoin de garde-fous, de sécurité. Pour la simple raison que les capacités cérébrales d’anticipation des conséquences de l’action ne sont pas opérationnelles. Mais pas que. Tant que la coordination des mouvements n’est pas parfaite un enfant peut avoir différents types d’accidents. Et puis il manque la connaissance et la maitrise de tout un tas de choses. Ainsi je peux tomber de l’escalier lorsque j’ai 10 mois, tomber dans la piscine quand j’ai 3 ans, tomber sur du porno sur l’ordinateur quand j’ai 7 ans et ainsi de suite, vous avez compris. Mais je peux également porter préjudice à autrui, parce que je ne peux pas maitriser mes pulsions de vie (besoin ou envie), parce que je ne sais pas faire autrement ou parce que je ne m’en rends pas compte. En fait, j’ai une extraordinaire capacité à faire tout un tas de trucs qui mettent en péril ma sécurité, ma santé, mon image même, les autres ou leurs libertés et droits. Heureusement, j’ai des parents!

 

La responsabilité parentale

 

Ce qui est évident pour moi c’est que le parent endosse un rôle de protection de son enfant, et d’un point de vue philosophique, cela n’est pas compatible avec la pleine liberté de choix que certain.e.s d’entre nous souhaitent permettre à leurs enfants. Pas loin de considérer que quand il n’y a pas de solution on doit reconsidérer le problème, et ayant passé d’innombrables heures à essayer de concilier la théorie avec ma pratique parentale par souci de cohérence et de congruence, j’arrive aujourd’hui à la conclusion que la pleine liberté de choix d’un enfant, n’est pas compatible avec la responsabilité parentale. Et plus vite on admet ça, moins on se tourmente avec nos incohérences et mieux on assume ce qui doit être assumé. C’est à dire les choix qu’on opère pour nos enfants. Parce qu’il n’y a pas de non-choix. A titre d’exemple, que l’on décide de vacciner ou pas son enfant on opère un choix pour lui. Que l’on décide de le scolariser ou pas, on opère un choix pour lui.

 

Pour laisser un enfant complètement libre de ses choix, il aurait fallu commencer depuis le début, en lui demandant s’il a envie de naître et s’il veut bien accepter ses parents, ses grand-parents, sa maison, sa ville, son pays, son prénom et ainsi de suite. J’ai mis beaucoup de temps à accepter que je prends des décisions pour mes enfants, mais depuis que cela a fait son chemin je parente avec moins d’ambiguïté, moins de culpabilité d’être incohérente. Au départ je voyais la famille comme une colocation dans laquelle l’enfant arrive, avec les mêmes droits que tout le monde, évidemment ! J’ai dit des tas de fois que combattre les Violences Educatives Ordinaires sans combattre l’âgisme c’est se mettre le doigt dans l’oeil au mieux, manipuler en conscience au pire. Je m’accordais le droit d’être limitante et interventionniste par devoir de protection de leur santé, leur sécurité et des libertés des autres, mais quand-même je voyais bien que ça manquait un peu d’égalité, de démocratie dans la prise de décision. Il devait bien manquer quelque chose dans ma conception de la fonction parentale et donc dans ma conception de la relation parent/enfant. Il manquait…

 

La dépendance

 

Un enfant se retrouve de fait dans un statut particulier: celui de la dépendance, comme une personne âgée ou une personne malade. Et ça, ça change tout dans la conception égalitariste de la relation parent/enfant. La relation ne peut pas être égalitaire car une prise en charge de l’enfant est nécessaire et obligatoire (même par la loi). Et qui dit prise en charge dit ascendant sur l’autre. C’est important d’admettre et d’accepter cette responsabilité vis-à-vis de son enfant. Ce qui est compliqué c’est de réussir à remplir cette obligation parentale tout en respectant l’individualité de l’enfant, sans tomber dans le langage de la domination, sans l’écraser sous le poids de l’évidence de notre autorité… Et c’est là que la parentalité positive fait sens! On peut s’y retrouver avec le terme très cher à une amie d’équidignité (en vrai ça vient de Jesper Juul mais moi je n’ai pas encore lu Juul!). L’égalité dans la relation est possible à condition qu’on ait les mêmes capacités, si on n’intègre pas ça on a vite fait de se sentir lésée que notre enfant ne nous fasse jamais à manger…

 

Donc la parentalité bienveillante, positive, empathique oui, le combat contre l’âgisme mille fois oui aussi, mais une conception égalitaire de la relation parent/enfant est vraiment très injuste pour l’enfant : il ne peut tout simplement pas faire autant ou pareil que nous. Et là, c’est à nous de prendre nos responsabilités, qui ne manqueront pas de faire défaut à sa liberté de choix.

 

* Je mets au féminin parce que l’écrasante majorité qui débat sur ces sujets sont des femmes.

De la liberté d’aimer la Reine des Neiges

Par Vicky

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En début de saison, et à défaut d’avoir pu récupérer des vêtements d’occasion pour les enfants1, je suis allée faire les magasins avec mes deux petits lutins, de 3 et 6 ans. Je leur ai proposé de choisir ce qui leur plaisait. Et ce qui devait arriver arriva : on s’est retrouvés avec des t-shirts Reine des Neiges, Spiderman, Avengers, avec des caleçons Star Wars…

Et en fait… fin de l’histoire ! Parce que cet article a précisément ce but-là : passer le message que nos enfants ont le droit à leurs goûts et leurs opinions, aussi éloignés soient-ils de notre monde de référence ou de l’éducation que nous souhaitons leur donner.

Bien sûr que je fais partie des parents qui ne souhaitent pas donner une éducation sexiste et genrée à leurs enfants. Que dis-je « ne souhaitent pas » ? Il en est hors de question, on déteste ça, on milite même pour le contraire, brandissant en guise d’étendard notre bébé garçon habillé en rose et notre petite fille déguisée en pirate. Oui j’ai fait partie de ces parents et je trouve que ce combat est louable et doit être mené. Mais pas à travers les enfants ni à leur dépens. Comme tous les combats en fait, d’une façon générale je considère que nos enfants n’ont pas à être transformés en revendications politiques, ça devient de l’instrumentalisation. Et nous ne voulons pas ça, n’est-ce pas ?2

Alors que je laisse plutôt pas mal de liberté à mes enfants quand à leur façon de s’exprimer, bizarrement lorsque des propos « sexistes » sortaient de leur bouche, j’avais un peu tendance à leur tomber dessus : « Comment ça ce n’est pas pour les filles ce jouet ? A quoi tu vois ça, je peux savoir ? » ou alors à moraliser à fond « Les couleurs sont pour tout le monde, tu n’es pas obligé de te conformer aux normes, chacun met ce qu’il veut et ceux qui disent le contraire ce sont des idiots finis et rétrogrades ! ». Enfin, vous voyez le genre (hmmm…) ! Et j’y croyais dur comme fer que je devais faire mon boulot de mère féministe, qui ne veut pas de ces considérations chez elle. Et puis je me suis souvenue. Et après j’ai compris. J’ai compris ce qui était l’évidence même : l’importance de la liberté de choix et du respect des opinions de l’Autre. Mon enfant c’est un Autre. Cette réalité peut être vraiment très douloureuse à admettre, mais elle est pour moi la base de la parentalité bienveillante.

Je me suis souvenue donc, que quand j’étais enfant, le féminisme s’était invité chez-moi aussi. Je suis née en Grèce dans les années 80, il y avait encore grandement besoin d’être féministe3. Sauf que cela était le problème de ma mère (et de mon père accessoirement) mais pas le mien. Ainsi j’ai dû essuyer un certain nombre de phrases méprisantes quand mes choix n’étaient pas en adéquation avec les aspirations féministes de ma mère : tu n’as pas besoin de mettre une robe, les pantalons te vont très bien et ils sont plus pratiques, le maquillage c’est pour les grandes, ne sois pas ridicule, les poupées c’est pour les fifilles… D’une manière générale, ce que j’en ai retiré c’est que tout ce qui s’apparentait à la féminitude à mes yeux d’enfant (et pouvait éventuellement me faire envie) était pour les nazes. Et comme je n’étais pas une naze et qu’il était hors de question de le devenir, bah ces opinions-là sont devenues les miennes, et moi aussi je snobais le rose, moi aussi je snobais les filles un peu trop féminines (entendre : qui portaient des robes et qui avaient une belle coiffure), moi aussi je trouvais ça d’une débilité sans fond de jouer aux Barbies. Moi, je suis devenue ce qu’on appelle un garçon manqué. Qu’on ne vienne pas me dire que celle-ci est une éducation non-genrée ! Pourtant ma mère voulait exactement le contraire, voulait que je puisse considérer que tout est possible, et que mon genre ne m’interdit rien, qu’être fille ce n’est pas un frein. Et curieusement, être fille m’a empêchée de jouer aux poupées et à la dînette, de porter des robes à volonté et de me mettre du vernis à ongles de temps à autres. Parce que ces trucs-là c’était pour les fifilles. Et être fifille signifiait (pour ma mère) s’enfermer dans un monde d’apparences et de clichés machistes dont elle ne voulait pas pour sa fille ! Les peurs et les convictions de ma mère ont façonné son combat. Et moi je suis devenue à la fois le but et l’instrument du combat, au grand dam d’une certaine expression de ma féminité.

Vous pouvez alors imaginer combien ça a été douloureux pour moi de voir ma fille basculer en mode « princesse » vers l’âge de 2,5 ans. Tout en la laissant faire, j’exprimais ma désapprobation, voire mon mépris, pour ce modèle-là, par des petites phrases, tantôt dites à l’enfant, tantôt à l’assistance, qui ne devait surtout pas croire que je cautionne ça, moi, ex garçon manqué et mère féministe. Et puis bizarrement, lorsque mon fils a commencé à mettre les bijoux de sa sœur, ses barrettes et ses robes de princesse, c’était OK pour moi et surtout qu’on ne vienne pas me chercher pour me dire que « c’est un garçon » ! Mais alors ça veut dire que… mais oui (putain), ça veut dire que les peurs de ma mère sont aussi les miennes et que je suis en train de transformer mes enfants en outils de revendication sociétale, exactement comme elle l’a fait avec moi (putain) !

Ma fille, depuis deux ans, n’a pas mis un seul pantalon pour aller à l’école. On nous a demandé un jeans l’année dernière pour le spectacle de théâtre, sa prof a été très étonnée d’apprendre que ma fille n’en avait pas ! C’est robe toute l’année, qu’il vente ou qu’il pleuve, d’ailleurs elle m’a dit à ce propos : « le froid est pour moi le prix de la liberté ». Et l’année dernière c’était bijoux en plus : bague, collier, bracelet, boucles d’oreilles, parfois couronne sur la tête. Je n’ai jamais rien dit de méprisant, je l’ai laissée vivre ce qu’elle avait à vivre, explorer ce qu’elle avait besoin d’explorer à travers ce comportement vestimentaire. Besoin d’appartenance ? d’affirmation de sa différence vis-à-vis de moi ? de briller de mille artifices ? Je dis oui à tout. Je dis oui au droit de ma fille d’être celle qu’elle choisit et ce dès son plus jeune âge, j’ai du mal avec la conception âgiste de la liberté.

« Mais alors quand est-ce qu’on éduque ? Jamais ?» me direz-vous. Oui, jamais ! Éduquer c’est aliéner, ce n’est pas moi qui le dis, c’est Alice Miller (et je suis absolument d’accord avec ça). Même éduquer au féminisme c’est aliéner, c’est détourner l’enfant de ce qu’il a l’élan de vivre, d’exprimer, d’expérimenter, à cause de ses propres peurs de parent. Mais avoir des enfants c’est aussi ce partage de valeurs, je ne sauras nier ça, alors comment faire ? En commençant par comprendre que le partage va dans les deux sens et que, naturellement, si vous êtes convaincu.e.s que l’univers de votre enfant – que ce soit les princesses, les chevaliers, les Pokemons – ne vaut pas un kopeck, alors que vous vous détenez la vérité absolue, ça ne va pas marcher : vous allez immanquablement éduquer, c’est à dire projeter sur votre enfant votre personnalité. Si en revanche vous prenez le temps de considérer que cet Autre a un univers différent du votre, un univers qui lui procure plaisir, sécurité, confiance etc., et que vous avez envie de partager ça avec le petit Autre, là vous pourrez être authentiquement vous, avec vos besoins et aspirations, sans craindre d’aliéner cet Autre. Parce que là, vous pouvez toujours dire « moi je préfère me déguiser en dragon et je te prends sur le dos ma princesse, on va faire la tournée des bars, euh, des magasins de bonbons bio ! ». Vous voyez ? C’est très différent que de dire « les princesses c’est nul ». L’idée c’est d’exprimer son opinion sans dévaloriser celle de l’enfant.

En parentalité bienveillante on parle énormément du respect des besoins des enfants. Je pense que l’on peut y inclure celui-ci : j’ai besoin que tu me laisses traverser différentes phases autour de la construction de mon image et de mes goûts, aussi kitsch et contraires à tes convictions celles-ci puissent être. Seulement comme ça je pourrai me construire selon qui je suis moi, sans être aliéné.e par toi. Ton influence est de toute manière énorme, vu que je vis avec toi, que tu es ma figure d’attachement et que je te modélise énormément. Ça laisse déjà peu de place à ce qui est authentiquement à moi, préserve cette place de ton influence, s’il te plait.


  1. Acheter d’occasion permet de préserver des ressources.
  2. Cette vidéo illustre un peu ce que je veux dire. C’est peut-être sincère mais j’en doute quand même beaucoup. Et au lieu d’y voir une jeune fille éveillée, j’y vois plutôt une enfant-perroquet, complètement instrumentalisée. Mais peut-être que je me trompe.
  3. Il y a toujours besoin d’être féministe, en Grèce et partout dans le monde.

Quelques outils pour faire face aux colères des 2-3 ans

Par Vicky

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Concernant les enfants des 2-3 ans, les colères semblent être le problème face auquel les parents nous nous sentons le plus démunis. Avant de parler des colères, il me semble important de faire une grande parenthèse sur la fameuse « phase d’opposition » car la frustration qu’elle engendre, de part et d’autre, est source d’une bonne partie des colères des enfants… et des parents !

Tout d’abord j’ai un scoop pour vous : la phase d’opposition n’en est pas une ! Oui, vous avez bien lu, la période du non n’est pas une phase d’opposition au parent, bien que l’enfant s’oppose. En réalité il s’agit de la période de l’émergence du désir propre de l’enfant. L’enfant s’oppose à son parent parce que le temps est venu pour lui de sentir le contour de lui-même, de ne plus être le prolongement de sa mère et de son désir à elle. Ainsi, l’enfant dit non au désir de la mère pour avoir l’occasion de sentir ce qu’il veut lui, peut-être qu’il veut la même chose mais, tant qu’il ne s’est pas opposé, il ne peut pas le savoir. Il a besoin de décider. On entend souvent que pendant cette période l’enfant cherche les limites, nos limites. L’enfant cherche effectivement les limites mais pas les nôtres : les siennes. Il cherche les limites de sa propre personne, telle qu’elle se définit par ses désirs, ses capacités et son pouvoir personnel.

Le parent vivant cela comme un affront et comme une remise en question de son autorité, pense que l’enfant veut prendre le pouvoir dans la maison et fait tout pour ne surtout pas lâcher ses acquis parentaux ! Bonne nouvelle : votre enfant ne prépare pas un coup d’état ! Plus on accompagnera cette phase avec bienveillance, moins longtemps on y sera confronté. Le mieux c’est de ne pas rentrer dans un jeu de pouvoir où l’on essaierait d’asseoir une autorité, car cela est absurde pour l’enfant. L’enfant n’est pas en train de chercher à prendre le pouvoir sur nous mais sur sa personne. Ainsi lorsqu’on s’oppose systématiquement à son désir, le message que nous lui faisons passer c’est : « tu n’as pas le droit de vouloir, de penser et de ressentir par toi-même ». « Casser » l’enfant pendant cette période cruciale donnera à coup sûr l’un des ces deux résultats : l’enfant soit il se fixera sur cette « phase d’opposition » pour toujours, développant ainsi une personnalité rebelle, soit il se soumettra, développant une tendance à la soumission.

Si vous observez attentivement, vous constaterez que cette période est suivie par celle du « moi tout seul ». En effet, lorsque l’enfant a acquis la capacité de savoir ce qu’il veut, il veut le faire par lui-même. C’est sur le chemin vers l’autonomie que nous l’accompagnons tout au long de ces turbulences ! C’est même une formidable occasion pour nous, parents, de sentir aussi les limites de notre volonté et la légitimité des tas de choses que nous imposons à nos enfants, contre leur volonté. Lâcher sur les choses pas importantes, permet à l’enfant de se connaitre et de se construire, et à nous de sortir des jeux de pouvoir dans lesquels nous rentrons presque instinctivement.

J’ai fait un détour par la période du non parce que je pense que comprendre que l’enfant n’agit pas contre nous, nous permet de prendre du recul, de manière à pouvoir gérer nos propres émotions (souvent de colère) pour faire face à la colère de l’enfant. Car à ce moment-là il s’agit d’aider l’enfant.

Un enfant en bas âge peut déclencher une colère pour des tas de raisons : fatigue, frustration exogène (on m’empêche de…) ou frustration endogène (je n’arrive pas à…), douleur… Et très souvent il peut aussi partir dans une colère monstre sans qu’on ait eu le moindre élément de compréhension rationnelle. L’expérience montre que quand la colère est là, peu importe ce qui l’a déclenchée, on ne peut pas faire marche arrière généralement. Car l’événement déclencheur n’est qu’un prétexte pour vider le trop plein d’émotions (et cela est souvent vrai pour nous adultes aussi). Mais le cerveau du jeune enfant n’est pas encore suffisamment équipé pour faire face à cela et c’est le déluge émotionnel. Alors il crie, il tape, il se roule par terre, il se cogne la tête… Tout est bon pour vider le trop plein d’émotions. Et pendant que lui ou elle vide son réservoir, on dirait que nous, nous commençons à remplir le nôtre ! « J’en peux plus ! » « Ça commence à bien faire ! » « Mais tu vas te taire ? » « Qu’est-ce que tu veux ? » « Tu me gonfles ! » J’ai déjà dit tout ça, et même plein de fois…

J’ai deux enfants. Il se trouve que le deuxième est né fâché, j’ai donc eu des centaines d’occasions pour m’exercer à la gestion des colères ! À vrai dire ça ne fait pas très longtemps que je suis vraiment opérationnelle ! Mais avec le temps j’ai acquis quelques vrais outils et je tiens à vous les partager.

Outil n°1 : l’empathie la vraie. Pas l’empathie en tant que posture. Et comment est-ce qu’on arrive à ça ? Ce qui a été le déclencheur pour moi c’était de comprendre profondément (intellectuellement) que lorsque mon enfant est en crise il est le premier à souffrir de ce qui le traverse. Quand je me mets en colère moi aussi parce que je n’en peux plus des cris et de ma propre impuissance, je rajoute à sa peine la culpabilité et le sentiment d’être incompris. Je triple sa peine, et du coup la mienne vu que je rallonge la crise. Lorsque j’ai compris à froid et à tête reposée cette simple réalité-là, je suis devenue capable de me placer à 100% du côté de mon enfant lors d’une crise émotionnelle. Je ne me suis plus jamais mise en colère face à ça, car j’ai considéré que mon rôle était de l’aider à s’en sortir. Je suis donc devenue alliée, pas persécutrice. J’estime que gérer sa propre colère dans des situations comme celle-ci (enfant en crise) n’est pas très aidant. Ce qui est aidant c’est de ne plus se sentir en colère. Selon notre propre histoire cela peut être plus ou moins atteignable, mais parfois la seule prise de conscience de la réalité de la situation peut suffire. Essayez !

Outil n°2: l’humour et l’imaginaire. Mon enfant a eu la bonne idée d’emprunter à la crèche le livre « La colère du dragon ». Un petit garçon raconte comment il se transforme en dragon lorsqu’il est en colère. Nous l’avons lu et relu, et relu même ! A partir de là, quand je vois un début de colère poindre je dis « Oh-oh on dirait que le dragon arrive ! Est-ce qu’il est là ? », après je fais des bruits de grognement, je lève les bras, enfin j’essaye d’imiter un dragon… La plupart du temps il rentre dans le jeu et ça finit en bataille sur le lit. Si cela n’est pas suffisant parce que la colère semble un peu plus importante je prends son rôle. Je commence à dire ce qu’il dit d’habitude : « arrête ! maman me parle pas ! », je fais comme si je voulais le taper, je me roule par terre… Au début il m’observe, il est entre le rire et les larmes et puis ça finit en franche rigolade. La crise est désamorcée et les émotions peuvent s’évacuer par le rire. Le rire est un puissant mécanisme de décharge du stress. Alors à choisir…

Outil n°3: raconter ce qui se passe. J’ai découvert un truc génial, un soir en vacances, alors que mon enfant était en pleine crise depuis une demi heure et que rien n’y faisait. J’ai dit au papa en présence de l’enfant :

 « T’as vu comme il est en colère A. ce soir ? »

« Ah oui, j’ai bien remarqué, il pleure depuis tout à l’heure, il est inconsolable ! A ton avis c’est dû à quoi ? »

L’enfant avait arrêté de pleurer et nous écoutait. Alors je réponds :

« A mon avis il pleure parce que telle chose est un peu compliquée pour lui, et puis il y a ci, et puis il y a ça… »

« Je comprends, moi aussi à sa place je serais triste et en colère, moi aussi je pleurerais »

« Tu as vu ? Il s’est calmé… »

« Moi à sa place je voudrais un câlin maintenant »

« Papa je veux un câlin »

Je me suis sentie tellement fière de cette astuce et à la fois je mesurais tout ce temps perdu sur les crises précédentes, alors que c’était tout simple. L’enfant a arrêté parce qu’il s’est senti parfaitement compris. Comme le papa n’est pas toujours là, je me sers du doudou, ou même de ma main ! Je discute avec doudou de ce qui est en train de se passer et de ma compréhension de la situation. C’est radical.

Je vous ai dit que mon enfant « est né fâché ». Il avait vraiment cette expression, sourcils constamment froncés dès son premier jour. Quand sa sœur l’a vu pour la première fois elle a demandé pourquoi il était fâché. Ça nous a bien fait rire mais par la suite j’ai été amenée à repenser à cette phrase des tas de fois. Il se mettait en colère très souvent, je ne le comprenais pas, je ne savais pas quoi faire. Je me suis posée des tas de questions, sur la grossesse, sur ma façon d’être, sur mes émotions à moi, la psychogénéalogie. On a  lui a raconté ce qui avait merdouillé pour moi comme pour lui, on a essayé l’homéopathie, le psy, le kiné, même une énérgéticienne, pourtant ce n’est vraiment pas ma tasse de thé. Parce que, comme beaucoup de mamans, je pensais que mon enfant avait un problème et que ça venait forcément de moi. Donc je devais trouver une solution! Je ne comprenais pas ce qui faisait qu’il était autant en colère. Aujourd’hui je pense que le plus important c’est d’accepter que cet enfant ait ce fonctionnement-là et de ne pas considérer cela comme forcément problématique. Je me suis longtemps débattue avec l’idée du tempérament car je pensais que rien ne vient du hasard. Je le pense toujours mais de manière plus nuancée: rien ne vient du hasard mais il y a des tas de choses dont je ne connaîtrai jamais l’origine et qui ne sont pas et ne seront jamais sous mon contrôle. Alors le fait que mon enfant soit enclin à la colère je l’accepte, je lui reconnais ce droit, et tant que son petit cerveau n’arrive pas à faire le travail de l’apaisement tout seul, je lui offre mon soutien entier et inconditionnel pendant ces moments difficiles.

Le Front Commun

Par Vicky

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J’ai décidé d’écrire sur ce sujet « mineur » parce qu’il prête encore beaucoup à confusion, même lorsqu’on est dans l’éducation bienveillante (ou positive) ! On entend toujours, que ce soit par la bouche des professionnels ou par celle de qui veut bien donner son avis, que les parents doivent faire Front Commun face à l’enfant. Ce qui implique que le parent A doit taire ses particularités, ses points de vue, ses ressentis au profit de la présumée autorité du parent B.

Imaginez que votre compagne/on dit à votre enfant « tu ne te lèveras pas de table tant que tu n’as pas fini ton assiette« . Et vous, parce que vous savez qu’il y a une demi-heure il a mangé un paquet de chips, et parce que vous êtes venus voir Carlos González en conférence (1) et parce que tout simplement vous tenez à respecter les besoins de votre enfant, vous avez quand même envie d’intervenir en faveur de l’enfant. Halte ! Selon le sacro-saint principe du Front Commun il ne faut surtout pas prendre la défense de l’enfant ! Parce que si vous, vous n’êtes pas d’accord avec l’autre parent, l’enfant soit il trouve une faille et s’y engouffre (et fait donc ce qu’il veut) soit il se sent terriblement en insécurité car les deux piliers de la famille ne sont pas bien parallèles. Vraiment ?

Je ne crois pas. Je crois que chaque parent est un être humain à part entière en non pas la moitié de l’entité parentale. Je ne crois même pas à l’entité parentale, dans ce cas cela servirait à quoi d’avoir deux parents ? Chaque parent est une personne, avec ses avis, ses convictions, ses valeurs, ses sensibilités, son passé, ses ressentis, ses besoins propres et c’est même très important pour l’enfant de pouvoir apercevoir tout ça, pour qu’il puisse à son tour construire sa propre identité. Il saura ainsi qu’il a le droit d’être unique.

J’ai décidé d’écrire sur ce sujet mineur, parce que je me souviens toujours à quel point je trouvais ça injuste et même ridicule, de voir un de mes parents se rallier à l’autre, parce que le mot d’ordre était Front Commun ! Je lui en voulais terriblement quand je voyais qu’il était d’accord avec moi mais qu’il ne fallait surtout pas le dire… Mais en fait, si nous ne défendons pas nos enfants, qui va le faire ? Oui, les défendre quand ils ont besoin de cet appui, peu importe qui ils ont en face. Cela peut être l’autre parent, le professeur, la grand-mère, la sœur… Lorsqu’on s’oppose à l’autre parent pour prendre position pour l’enfant on lui permet plusieurs apprentissages: on lui montre que le désaccord n’est pas un problème, que l’on peut être souple et que rien n’est gravé dans le marbre. Que l’on peut se tromper en tant que parent ou alors que notre avis n’est qu’un avis, pas une vérité universelle. Que notre âge n’est pas un facteur de supériorité et qu’on peut reconnaître qu’il puisse avoir raison. Sans parler bien sûr du fait que ça réchauffe le cœur de l’enfant lorsqu’il se sent mal avec ce qui est en train de se passer et qu’il se sent un tant soit peu soutenu ! C’est même très sécurisant… Etre ouvert à l’opposition de l’autre parent prouve aussi à l’enfant qu’on n’abuse pas de notre pouvoir sur lui, que quand on fait fausse route on est prêt à l’entendre. Je ne sais pas vous, mais moi je prends ! Une éducation bienveillante va dans le sens de l’ouverture, de la tolérance des avis divergents et des différences, des rapports humains égalitaires sans distinction d’âge, de l’humilité aussi… ça me parait assez cohérent !

Je ne vous propose pas, bien entendu, d’entamer une franche engueulade, qui plus est devant les enfants ! Evidemment dans ce cas le bilan est plutôt négatif : on montre à l’enfant que désaccord égale dispute, il culpabilise parce que ses parents se disputent « à cause » de lui, angoisse… Nan, c’est pas ça ! Ce qu’on peut faire c’est exprimer notre avis ou ressenti sans juger le point de vue de l’autre parent, ou encore apporter de l’information : « ce n’est pas étonnant qu’il n’ait plus faim, son petit estomac est déjà plein, il vient de manger un paquet de chips« . Lorsqu’on voit que l’autre parent est dépassé et vire vers la VEO (2) on peut proposer de prendre le relais tout de suite. Cela passe beaucoup mieux que de longues tirades d’indignation sur la façon de l’autre de parler à votre enfant! Car, généralement, il n’en est pas fier mais, dépassé par ses émotions, il n’arrive pas à gérer mieux que ça. Alors là, tout le monde vous sera reconnaissant: l’enfant parce que le calme revient et il n’est plus accablé/stressé/apeuré, l’autre parent parce que vous lui avez offert une porte de sortie, avec empathie. Vous lui avez proposé de prendre le relais parce que vous avez senti que c’était difficile pour lui, pas parce que vous ne supportiez pas sa façon de faire. Ce petit détail peut faire une énorme différence, et si vous êtes sceptique vous n’avez qu’à essayer !

Je pense que le Front Commun est un concept qui mériterait maintenant d’être dépassé. Il a eu son heure de gloire lorsqu’on essayait de sortir de l’autoritarisme éducatif pour établir une autorité juste (ça me fait mal au cœur d’écrire une telle antinomie, mais passons) et cette autorité était tellement fragile -parce qu’elle ne voulait plus s’appuyer sur la force mais elle a vite compris qu’elle ne pouvait pas s’appuyer sur grand chose d’autre- qu’elle devait absolument être soutenue par un consensus parental, voire sociétal, éducatif, qui opposait les mineurs aux majeurs. Les majeurs (parents, enseignants, voisins) avaient raison. Les mineurs avaient tort. En cas de confrontation le majeur l’emportait. Evidemment si les majeurs commençaient à se remettre en question entre eux, la révolution des mineurs n’était pas loin… Alors le Front Commun avait naturellement du sens. Mais plus maintenant, pas dans l’éducation bienveillante. Parce que n’oubliez pas que qui parle de Front parle de Guerre. Ne tirez pas sur vos enfants 😉


1. Voir .

2. Violence Éducative Ordinaire (voir ici)

Les réflexes éducatifs

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Par Vicky

Lorsque ma fille Stella avait 10 mois à peu près, elle s’amusait à tirer sur les fils de la lampe du salon, précisément parce que je le lui interdisais. A ce moment-là j’étais occupée avec de la paperasse et le message « maman prête-moi de l’attention » était évident mais je ne pouvais pas répondre à sa demande. Pour autant je la trouvais légitime. Ceci dit la répétition de son comportement dangereux malgré la répétition des « non » de ma part a fini par m’énerver (il faut dire que je ne suis pas de nature très patiente, même si avec le temps je m’améliore). J’ai donc attrapé sa petite main et je m’apprêtais à lui mettre une tape dessus. Et je me suis arrêtée aussitôt, avant de le faire. Parce que je n’ai pas pu m’empêcher de me demander pourquoi exactement je m’apprêtais à faire ce geste :

qu’allait-elle en tirer ? Que voulais-je lui apprendre et qu’allais-je lui apprendre ? Qu’est-ce qu’elle allait ressentir physiquement et psychologiquement ? Avais-je le droit de le faire ? Jusqu’où vont nos droits vis-à-vis de nos enfants ? Et surtout et avant tout : qu’est-ce qui m’a poussé moi à le faire ?

Ce moment-là a donné naissance à de multiples 
réflexions et constatations, dont sûrement la plus importante était l’existence de réflexes éducatifs. Et donc la nécessité de s’en débarrasser, de s’en libérer pour tendre vers une éducation réfléchie, choisie, adaptée à ma famille à moi (plutôt qu’à celle qu’ont construite mes parents), qui reflètera mes aspirations éducatives et sociétales. Une éducation qui ne reproduira pas toutes ces choses qui ont pu me faire souffrir en étant enfant, et dont je me souviens très bien. Ma mémoire n’a jamais permis ce genre de rupture d’avec mon enfance. Je n’ai pas oublié le sentiment d’injustice que je pouvais ressentir dans diverses situations, ni l’envie de « me venger », cette frustration d’être toujours l’enfant, celle qui subit ce qui semble bon et juste aux parents et qui sait qu’elle, elle n’aura jamais ce pouvoir vis-à-vis d’eux.

Mes parents n’étaient ni des gens conventionnels, ni des gens bêtes, ni des tyrans. Cela n’a pas empêché les
erreurs et les ratés. Oui c’est inévitable, mais ce qui importe aujourd’hui 
pour l’adulte et le parent que je suis c’est de les reconnaître, de ne surtout 
pas fermer les yeux dessus. J’ai entendu des adultes de la génération précédente 
défendre leurs choix éducatifs en disant « nous on a fait comme ça et nos enfants n’en sont pas morts/traumatisés/malheureux etc. ». J’ai entendu des 
gens de ma génération défendre l’éducation qu’ils ont reçue en disant
« mes parents m’ont éduqué comme ça et je ne m’en porte pas plus mal ». Voilà, tout est bien qui finit bien, on se croirait dans un monde d’adultes bien portants, sains, dans une société qui va dans le bon sens. Et pourtant j’ai plutôt l’impression que la société n’a plus aucun repère qui vaille, aucune valeur réellement humaniste, je vois des adultes névrosés et malheureux dans tous les milieux, sans parler des excès de violence juvénile, du pétard à 13 ans qui ne choque plus personne, de la consommation excessive d’alcool et ainsi de suite. Une société qui va droit dans le mur, avec des jeunes ni bien dans leurs têtes, ni bien dans leurs baskets.  Mais personne ne veut se remettre en question ! Tout le monde a bien éduqué ses enfants, tout le monde a été bien éduqué ! Pourvu qu’on n’ait pas à se poser des questions qui nous 
emmènent à considérer nos parents, nous-mêmes ou nos enfants comme défaillants.

Ma mère pense que du moment où un parent est bienveillant et donne le meilleur de lui-même, on n’a pas le droit moralement de lui reprocher grand’ chose. C’est pourquoi elle n’est pas toujours réceptive à mes « analyses ». Et en effet beaucoup de gens pensent comme elle. Sauf que peu importent les reproches, ce n’est absolument pas là qu’il faut mettre l’accent. Il s’agit d’identifier les problèmes, les erreurs qui ont été faites dans le but de ne pas les reproduire. Certains ressentiront le besoin de faire des reproches à leurs parents, d’autres pas. En tout cas, ce n’est absolument pas l’étape des reproches qui fera de nous des meilleurs parents, c’est la prise de conscience. Il est important de renouer avec ses ressentis d’enfant vis à vis des comportements des adultes. Car si le jugement d’un enfant n’est pas toujours à retenir, les
 ressentis en revanche il faut toujours les considérer. Alors que nous savons respecter (ou faire semblant de respecter) les ressentis d’un adulte, bizarrement ceux des enfants on les calcule beaucoup moins, comme s’ils étaient 
moins importants, moins déterminants, moins décisifs pour leur développement, alors qu’ils en sont le fondement même.

Il y a toujours quelqu’un de bienveillant pour nous dire : de toute façon ce ne sera pas parfait, des erreurs on en fait tous et blablabla. Ce n’est pas une raison pour nous dédouaner, c’est trop facile ! Ce n’est sûrement pas sous prétexte que des erreurs seront faites qu’il ne faut pas tout faire pour les éviter. Alors libérons-nous des nos réflexes éducatifs, des choses que nous faisons parce que « ça a toujours été comme ça », prenons-nous la tête sur le pourquoi du comment, nous pouvons et devons faire mieux que la génération précédente. L’éducation de nos enfants n’est pas à prendre à la légère et l’amélioration de nos sociétés est d’une urgence absolue. Je ne vois pas grand chose qui vaille la peine plus que ça. Car il s’agit bien de peine, comme tout effort de réflexion.

Se faire opérer du sein en cours d’allaitement ? Oui, c’est possible !

Par Vicky

[Nous sommes très honorées de partager avec vous le témoignage que nous a offert Vicky. C’est un texte très fort et très nécessaire en ce qu’il apporte d’informations, mais aussi de volonté et de persévérance. Un grand merci à elle.]

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Fin avril 2013, alors que j’étais enceinte de 7 mois et demi, je découvre une petite boule sur mon sein gauche. Le cœur battant à toute allure, je file à ma maternité pour voir un gynécologue. Cela n’a pas l’air bien grave mais faites une écho quand même. L’échographie donne quelques indications qui me conduisent à faire une ponction pour effectuer une biopsie. Tumeur phyllode, une tumeur du sein très rare, bénigne à priori, mais qui nécessite une opération dans des délais brefs, car elle a tendance à devenir agressive. Et puis tant qu’on ne l’a pas enlevée et toute biopsiée on ne peut être totalement sûrs que ce n’est pas un cancer.

Tous ces examens se sont passés en dehors de la maternité, c’est une amie gynécologue qui m’a guidée. J’ai transmis les résultats à la maternité et j’ai attendu le verdict. Une médecin m’a appelée. C’était un mercredi. Elle m’a dit : « nous avons discuté de votre cas ce matin et nous vous proposons de vous déclencher la semaine prochaine, on vous opérera un ou deux jours plus tard. Par contre il n’est pas question d’allaiter car si vous avez votre montée de lait, on ne pourra pas opérer. Vous ferez une tétée de bienvenue et après on vous donnera des médicaments pour arrêter la montée de lait. » Je me suis effondrée, je me suis mise à pleurer, au téléphone. « Mais vous savez, allaiter c’est trop important pour moi, ça me tracasse ce que vous me dites ». « Moi ce qui me tracasse c’est votre tumeur madame, vous avez une chance sur trois d’avoir un cancer, on ne peut pas attendre. Prenez un deuxième avis si vous le souhaitez et appelez-nous lundi pour nous donner votre réponse ». Autorité médicale, peut-être la forme d’autorité que je déteste le plus…

Ce n’est pas le moment de pleurer, je prends mon téléphone, je trouve les bons interlocuteurs et j’arrive un choper un rendez-vous pour vendredi avec le super spécialiste du cancer du sein pendant la grossesse à Paris ! Jeudi, la même médecin (à qui l’on n’a pas expliqué que tout n’est pas bon à dire au téléphone) laisse un message sur mon répondeur : « nous avons décidé de vous déclencher lundi finalement parce qu’après on tombera sur le week-end pour votre opération et ce sera plus compliqué. Venez demain matin en discuter avec le chef de service. » Deuxième effondrement.

Le lendemain matin je vais à mon rendez-vous avec mon super spécialiste, avant d’enchaîner avec la maternité. Il est rassurant, il pense que je ne cours aucun danger imminent, que je peux accoucher normalement, quand mon bébé sera prêt, que je pourrai allaiter un mois et refaire une écho. Si la boule a grossi, arrêt de l’allaitement et opération. Sinon je peux prendre encore un petit mois pour allaiter. Et après basta. Je suis heureuse, je pourrai allaiter ! Peut-être un seul mois, ou deux mais c’est mieux que rien, j’en suis ravie. J’explique tout ça à la maternité, pas de problème, on fait comme vous le sentez.

J’accouche, j’ai un beau bébé, un magnifique bébé qui tète très bien, qui grossit comme il faut, même plus. Et la fin prochaine de l’allaitement me travaille, me frustre, ne me laisse pas pleinement en profiter. Ce n’est pas l’opération qui me tracasse, ce n’est pas l’éventualité d’un cancer, c’est la fin de l’allaitement. Je me rends bien compte que ce n’est pas normal mais c’est ainsi que je vivais la chose. Je n’ai pas envie de sevrer mon bébé, du coup je commence à négocier avec mon médecin : « et si je n’arrêtais pas d’allaiter ? » « Ce n’est pas possible, vous ne pourrez pas cicatriser, il y aura du lait qui coulera, vous vous infecterez et on devra vous re-ouvrir. » Oui, mais je n’ai quand même pas envie de m’y plier. En plus je sais que les médecins, aussi compétents soient-ils dans leur domaine, ne s’y connaissent pas bien en lactation et allaitement. Alors je m’adresse aux spécialistes : consultante en lactation, Leche League de ma ville, Docteur Marie Thirion. Oui, vous pouvez sevrer d’un seul sein, c’est possible.

Le premier mois est vite passé, l’heure du verdict est arrivé : la boule a doublé de taille, il faut opérer au plus vite. Je programme l’opération trois semaines plus tard (fin août) pour pouvoir partir en vacances et avoir le temps d’arrêter le lait au sein gauche. Il a eu sa dernière tétée de ce côté-là dans la salle d’attente du cabinet d’échographie.

Ça a été long et un peu compliqué mais ça a marché ! Il y avait toujours un peu de lait qui sortait du sein gauche mais je trouvais que c’était négligeable. Mon chirurgien a été très surpris d’apprendre (juste avant de m’endormir) ce que j’avais mis au point ! Mais il m’a opérée quand même !

Le jour de l’opération j’ai dû tirer mon lait et le jeter pour éliminer les produits anesthésiques. Le soir j’ai allaité mon fils. Il a dix mois aujourd’hui et je l’allaite toujours ! Le chirurgien avait raison sur toute la ligne : du lait a coulé par ma cicatrice pendant deux mois et j’ai eu une infection. Mais elle a été facilement traitée par antibiotiques et, finalement, deux mois et demi plus tard le « petit trou » s’est refermé. Et en plus ce n’était pas un cancer !

Si j’ai souhaité livrer ce témoignage c’est parce que, d’une part, je n’ai réussi à trouver aucune information sur le net pendant la période de mes interrogations sur la possibilité de se faire opérer du sein tout en étant en cours d’allaitement, et, d’autre part, parce que j’ai rencontré énormément de résistance de la part du corps médical et de mon entourage vis-à-vis de mon envie de continuer d’allaiter malgré tout. Les médecins ne voulaient pas prendre de risque et ma famille s’inquiétait. Mais moi j’avais la certitude que c’était possible, il me fallait juste un petit coup d’encouragement par les gens qui sont compétents en allaitement et lactation. Et je l’ai trouvé.

Si je livre ce témoignage c’est pour vous dire : cherchez l’information là où vous pouvez la trouver, ne vous pliez pas à l’autorité médicale, nous avons aujourd’hui énormément de moyens d’information, n’en déplaise aux médecins. Si je les avais écoutés j’aurais allaité un mois au mieux, pas du tout au pire. La question n’est pas « allaiter ou pas », mais disposer de son corps et de sa vie.

Merci beaucoup à Véronique Darmangeat, consultante en lactation dans la région parisienne, à Alice de la Leche League du 92 et au docteur Marie Thirion de m’avoir renseignée, encouragée et soutenue, ainsi qu’à mon fils Aris de m’avoir motivée et confortée dans ce choix.