Le développement du langage

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Le langage, mais à quoi ça sert ?

Tout d’abord, il nous sert à communiquer entre humains.

Il est aussi le support de la pensée et un accès à la symbolisation.

Le langage ne véhicule pas seulement des informations ou des demandes : il sert aussi à communiquer des sentiments, des impressions, des angoisses.

Il prend une part essentielle dans les relations de l’enfant avec autrui, et est intimement lié au développement et à la structuration du fonctionnement psychique.

 

Voilà qui est complexe ! Et de quoi est-il formé, ce langage ? 

Le langage est la « fonction qui permet d’exprimer et de percevoir des états affectifs, des concepts, des idées au moyen de signes » (Rondal)

La langue est un système de code propre à une communauté.

La parole est la production de significations sous forme de sons articulés.

Le langage est formé de quatre composantes :

  • La phonétique  : c’est le niveau concernant les sons du langage (phonèmes) : /p/, /b/, /s/, sont des phonèmes par exemple.
  • La  sémantique: c’est ce qui concerne les mots et leur signification (lexique), « câlin », « doux », « téter » appartiennent au lexique.
  • La  syntaxe  : ce sont les règles d’associations des éléments du langage entre eux, La phrase : « Dès le matin, je t’aime », est construite grâce aux règles syntaxiques du français.
  • La pragmatique : c’est l’étude des actes de parole en situation (contexte, intonation, niveau de langage…) « Il fait beau », peut servir à meubler un silence, à constater la météo, ou à suggérer que nous pourrions aller jouer dehors selon le contexte et l’intonation par exemple.

 

Ouah ! Mais comment en arrive-t-on à maîtriser tout cela ?

Tout d’abord, nous pouvons noter que les adultes adaptent leur façon de parler lorsqu’ils parlent aux enfants. En général, les gens varient davantage leur intonation avec les jeunes enfants de façon à maintenir leur attention. Les structures sonores sont aussi simplifiées. Le choix des mots est évidemment plus restreint et les structures syntaxiques sont plus régulières et plus complètes.

 

Alors, finalement, tout le monde y arrive ?

En effet, le langage est si bien ancré dans le code génétique de l’homme que la majorité d’entre nous parviendra à l’acquérir, même en étant porteur de handicaps. Le développement du langage est assez fixe d’un enfant à l’autre, mais avec des variations dans les dates des différentes étapes.

1)      Le stade pré-linguistique

a)      Le babillage (de 4-6 mois à 12 mois)

Dès 0-2 mois, le nouveau-né montre un intérêt privilégié pour la voix humaine et est capable de différencier les phonèmes.

Il joue avec les sons que son appareil phonatoire permet de produire. Ses premières productions vocales sont les cris.  Ils se diversifient dès les premières semaines en fonction des états éprouvés par l’enfant (faim, douleur, appel, bien-être…)

Vers 2-6 mois, les vocalisations se diversifient (babil…) Tous les bébés de la terre ont les capacités de prononcer tous les sons langagiers répertoriés. L’ordre d’acquisition de ces sons est à peu-près semblable pour tous les bébés.

Au début, c’est un jeu sensori- moteur, source de plaisir pour l’enfant, qui s’enrichit progressivement, et, entre, surtout après le 5ème-6ème mois, dans un jeu interactif avec l’environnement maternant.

 

La  production de syllabes  bien articulées débute entre 6 et 8 mois.

À partir de 8-10 mois, les productions se modifient en fonction du langage du milieu environnant. Le bébé perd peu à peu la capacité de distinguer les sons étrangers des sons de sa propre langue; il commence à se créer des classes de sons propres à sa langue et il assimile les sons des autres langues dans ces classes.

À l’évolution des productions vocales s’associe un développement de la communication non verbale : par le regard, puis par le sourire (mimiques). Par exemple, les sons qu’il produit avec son père seront différents de ceux qu’il produit avec sa mère.

Et, vers 8-9 mois l’attention conjointe se développe (l’enfant cherche à attirer l’attention d’autrui, porte son regard sur ce qu’on lui montre, pointe du doigt en direction d’un objet.)

 

b)      L’étape du premier mot (12-18 mois)

Les premiers mots sont des mono- ou dissyllabes systématiquement associées à certains objets ou à certaines situations (demande, désignation).

 

2)      Stade holophrastique (18-24 mois)

L’enfant s’exprime par mots isolés.

L’accroissement du vocabulaire est très variable d’un enfant à l’autre et relativement lent jusque vers 16 mois (moyenne 30 mots).

Vers la fin de la deuxième année, il s’accélère pour arriver à 250 à 300 mots vers deux ans.

 

Vers 18 mois, l’enfant commence à utiliser le  non, qui montre un progrès de son individualisation.

3)      Stade syntaxique (de 2 à 5 ans)

Les  premières phrases (association de deux mots, pour désigner une action) apparaissent entre 20 et 26 mois (protolangage).

 

Au cours de la  3ème année :

  • L’acquisition du vocabulaire s’intensifie pour atteindre environ 1000 mots à 3 ans. L’enfant perfectionne l’articulation des différents phonèmes.
  • L’acquisition de la syntaxe fait son apparition : les phrases sont d’abord de « style télégraphique » (mots-phrases, mots-valises), puis comportent progressivement sujet, verbe, complément, qualificatifs, pronoms.

Le « je » apparaît vers 3 ans, marquant une étape importante de l’individuation et de la reconnaissance de sa propre identité par l’enfant.

  •  Le langage adulte de base, correctement articulé, est généralement acquis entre 3 et 5 ans. Au delà, le langage continue d’évoluer : enrichissement du vocabulaire, perfectionnement de la syntaxe (concordance des temps, accord des participes passés)…

4)      Stade avancé (5 ans et plus)

C’est la période où l’enfant acquiert les fonctions les plus fines du langage (formes passives, les inversions verbales, etc.)

Il cherche à s’exprimer de façon plus appropriée au contexte. Ceci est rendu possible par le fait qu’il se distancie de sa propre perception pour réaliser que les autres ne perçoivent pas la réalité de la même façon que lui.

La prononciation s’affine, notamment quant aux liquides /R/ et /l/.

Le langage progresse aussi sur le plan expressif et cognitif (acquisition de la métaphore).

Vers 6 ans l’enfant est en général prêt pour l’apprentissage du langage écrit : la lecture est normalement acquise en une année scolaire, elle continuera de progresser par la suite (rapidité, automatisation).

 

Alors… pas d’inquiétude, tout va marcher comme sur des roulettes ?

Malgré tout, des difficultés d’apprentissage du langage, ou même des pathologies peuvent subvenir.

Retenons qu’environ 5% des enfants de 5 ans souffrent d’un trouble du langage.

Un bilan orthophonique, qui comprend des tests standardisés, est nécessaire pour préciser la plupart des  troubles.

 

1)      Les troubles d’articulation

Il s’agit de l’altération systématique d’un ou de quelques phonèmes (zézaiement, zozotement, schlintement…)

Ce trouble, isolé, est bénin, sans conséquences sur la suite du développement de la parole et du langage,  mais il peut persister indéfiniment en l’absence de rééducation.

Il peut également être associé à d’autres troubles de la parole et du langage.

Conduite à tenir : une rééducation orthophonique est généralement indiquée vers l’âge de 5 ans.

 

2)      Le retard de parole

Il correspond à la persistance des altérations phonétiques et phonologiques observées normalement (confusion et substitution de phonèmes voisin, omissions des syllabes finales, distorsions diverses etc. (persistance du « parler bébé »).

Conduite à tenir : une rééducation orthophonique est indiquée si les troubles persistent au-delà de 4-5 ans.

 

3)      Le retard simple de langage

Il s’agit d’une atteinte des composantes syntaxiques et lexicales du langage. Il s’accompagne souvent d’un retard de parole.

  • l’apparition du premier mot est tardive (après 2 ans)
  • le mot-phrase ou l’assemblage de 2 mots apparaît vers 3 ans
  • les pronoms et notamment le « je » sont utilisés vers 4 ans
  • le vocabulaire est réduit.
  • l’enfant n’utilise pas de phrases complexes, ne respecte pas l’ordre des mots, utilise la troisième personne au lieu du « je ».
  • la compréhension est meilleure que l’expression.

L’évolution est favorable, mais ces difficultés peuvent rendre difficile l’insertion scolaire, avec un retentissement dans les autres secteurs d’acquisition. Il faut prévenir les difficultés scolaires ultérieures, en particulier concernant l’acquisition du langage écrit.

Conduite à tenir :

Une rééducation orthophonique est généralement indiquée à partir de 4 ans, éventuellement plus précocement si les troubles sont sévères.

Elle peut être complétée par une rééducation psychomotrice si un retard moteur, des difficultés praxiques, ou des troubles de l’organisation spatio-temporel sont associés.

Une psychothérapie peut être proposée si des facteurs psychoaffectifs ou relationnels apparaissent prédominants.

 

[À venir : la dysphasie, le bégaiement, le handicap]

 

Aïe ! Mais quand dois-je m’inquiéter ?

  • Si l’enfant ne babille pas entre 4 et 9 mois, ou s’il est généralement silencieux, il serait important de consulter un audiologiste afin de faire évaluer l’audition.
  • Si vers l’âge de 2 ans l’enfant ne produit que des voyelles et aucune consonne, ou si l’enfant ne parle pas du tout.
  • Si, après 3 ans, les mots sont transformés au point de rendre le discours de l’enfant inintelligible la plupart du temps ; si l’enfant ne possède qu’un répertoire très limité de sons ou s’il doit utiliser régulièrement des gestes pour se faire comprendre.
  • Vers l’âge de 5 ans, si l’enfant omet ou transforme régulièrement certains sons (à l’exception du r, du ch et du j), s’il ne se fait pas facilement comprendre par des personnes non familières, s’il omet des syllabes dans les mots.
  • Si votre enfant d’âge scolaire présente des difficultés persistantes au plan de la prononciation ou que sa difficulté à se faire comprendre lui cause des frustrations, il y a lieu de consulter en orthophonie. Et s’il a été sujet à de nombreuses otites et qu’il présente des difficultés avec l’acquisition des sons du langage, une évaluation en audiologie est recommandée.

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